Je vous adresse la première lettre d'actualité du droit de l'urbanisme de
l'année. Le nombre de décrets publiés le mois dernier intéressant le droit de l'urbanisme est pour le moins spectaculaire...
1 ) Décret n° 2023-1259 du 26 décembre 2023 précisant les modalités d'application de la définition de la friche dans le code de l'urbanisme
Le décret permettant l'identification des friches est publié.
Chacun sait que le réemploi des friches constitue une condition incontournable de la satisfaction des objectifs législatifs de réduction de l'artificialisation des sols établis dans la
trajectoire vers le ZAN.
La qualification juridique des friches renferme pour cette raison un enjeu fondamental. Le législateur s'y est donc attelé. Depuis la promulgation de la loi "climat et résilience", la friche est
définie en substance par le code de l'urbanisme (art. L. 111-26) comme un bien inutilisé dont le réemploi nécessite des travaux.
Le texte renvoie toutefois à un décret le soin de préciser les éléments d'appréciation devant être utilisés pour vérifier la satisfaction de ces deux critères cumulatifs.
C'est chose faite depuis le 27 décembre dernier.
Les éléments d'appréciation alternatifs sont à présent fixés par le décret n° 2023-1259 du 26 décembre 2023 : concentration élevée de logements vacants ou d'habitats indignes, locaux vacants ou
dégradés en particulier à raison d'une cessation d'activités, pollution du site, coût financier significatif pour son réemploi...
Quant aux travaux nécessaires à son réemploi, ils "s'entendent comme les interventions permettant la remise en état, la réhabilitation ou la transformation du bien concerné".
Pour mémoire, aux termes de l'article L. 111-26 CDU : "Au sens du présent code, on entend par “ friche ” tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l'état, la
configuration
ou l'occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret".
Le texte du décret est consultable ici.
2 ) Décret n° 2023-1208 du 18 décembre 2023 sur l'intégration de de procédés de production d'ENR dans les projets de construction et d'aménagement
Ce décret permet à des dispositions de la loi climat et résilience relatives à l'intégration de procédés de production d'ENR (constructions et
stationnements) de trouver à s'appliquer dès le 1er janvier 2024 ! 🔔
Les dispositions législatives en cause ne proviennent pas de la loi APER de mars dernier qui par ailleurs créée de nouvelles contraintes en matière d'installations d'ombrières intégrant un
dispositif de production d'ENR
(stationnement > 1500 m²). Le décret d'application est ici encore en attendu.
Au titre de l'application du règlement national de l'urbanisme (L.111-19-1), le décret du 18 décembre définit les critères relatifs aux exonérations de l'obligation d'installer des revêtements de
surface,
des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l'infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation,
et de l'obligation d'installer des dispositifs végétalisés ou des ombrières comportant un procédé de production d'énergies renouvelable.
Les demandes d'autorisations déposées à partir du 1er janvier dernier sont donc concernées par le dispositif.
Les maîtres d'ouvrages et les pétitionnaires ont donc eu peu de temps pour en prendre connaissance et, si nécessaire, l'intégrer.
Le texte du décret est consultable ici.
3 ) Décret n° 2023-1173 du 12 décembre 2023 modifiant le régime des attestations à fournir lors du dépôt de demandes de PC et DP
Ce texte procède à la définition des zones sismiques et des catégories de bâtiments pour lesquelles une attestation spécifique sera exigée lors du dépôt de la demande de PC.
Le décret n° 2023-1173 du 12 décembre 2023 impose dans ce cas la production de l'"attestation relative au respect des règles de construction parasismique au stade de la conception telle que définie à l'article R. 122-36 du code de la construction et de l'habitation" .
Entrée en vigueur au 1er janvier 2024.
Le texte est consultable ici !
4 ) Décret n° 2023-1408 du 29 décembre 2023 sur la (non) prise en compte des installations agrivoltaïques dans le calcul de la consommation d'ENAF
Dernier décret à signaler (ouf !), le décret du 29 décembre d'application de la loi climat et résilience sur le régime dérogatoire bénéficiant aux installations agrivoltaïques dans le calcul de l'artificialisation des sols.
Afin de permettre de concilier la trajectoire vers le ZAN avec la nécessité de développer, par ailleurs, les énergies renouvelables, un principe dérogatoire au calcul de la consommation d'espaces NAF
a été introduit pour les installations photovoltaïques implantées sur les espaces agricoles ou naturels.
Ainsi, le 6° du III de l'article 194 prévoit, pour la première tranche de dix ans, les conditions dans lesquelles un espace naturel ou agricole occupé par une installation de production d'énergie photovoltaïque au sol n'est pas comptabilisé dans la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, en précisant d'une part, que l'installation ne doit pas affecter durablement les fonctions écologiques du sol ainsi que son potentiel agronomique, d'autre part, qu'elle ne doit pas être incompatible avec l'exercice d'une activité agricole ou pastorale sur le terrain sur lequel elle est implantée, si la vocation de celui-ci est agricole.
Le décret a pour objet de préciser les modalités de mise en œuvre de ce principe dérogatoire et donc les critères d'implantation de ces projets permettant de remplir les conditions prévues par la loi.
Il prévoit des mesures transitoires pour les installations de production d'énergie photovoltaïque dont la date d'installation effective ou la date de dépôt de la demande d'autorisation
d'urbanisme est comprise entre la promulgation de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et la
publication du présent décret.
Il renvoie à un arrêté des ministres chargés de l'énergie, de l'urbanisme et de l'agriculture le soin de préciser la liste des caractéristiques techniques permettant l'atteinte des critères sur
lesquels il s'appuie, afin d'exclure certaines installations du décompte de la consommation d'espace.
Cet arrêté fixera également la liste des données et informations à renseigner par les porteurs de projets dans une base de données nationale, à l'occasion d'une nouvelle opération, et qui
serviront de référentiel aux autorités en charge de l'élaboration des documents d'urbanisme pour le calcul de la consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers de la première tranche
de dix années.
Le texte du décret est consultable ici.
5 ) Etude comparée des permis de construire en Europe publiée par le Sénat
Si vous avez un peu de temps, je vous recommande la lecture d'une étude sur les procédures de délivrance des permis de construire chez quatre voisins européens : Allemagne, Espagne, Italie et Royaume-Uni.
Comme l'explique le résumé du document, cette étude présente le cadre général du droit de l'urbanisme dans chaque pays, puis analyse de façon systématique le champ des travaux requérant un permis de construire
et les éventuelles exemptions prévues, les différentes étapes de la procédure de permis de construire (de la demande à la délivrance du permis), la durée de validité du permis et les exigences relatives au commencement et à l'achèvement des travaux, la publicité du permis de construire, la fiscalité et les frais administratifs et, enfin, les voies de recours administratif ou juridictionnel. La notion de permis de construire est comprise de façon large, au sens des autorisations d'urbanisme en droit français (permis de construire, d'aménager, de démolir etc.).
Pour aller télécharger l'étude, c'est par ici !
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